19 Avril 2002
Un laser pour mesurer la pollution
Dans le cadre d´un projet scientifique franco-allemand, le campus
de la Doua a accueilli hier le Téramobile : le laser mobile le plus
puissant au monde. Pendant trois mois, une équipe de chercheurs
lyonnais se livrera à des expériences " grandeur nature "
visant à observer la propagation des faisceaux lumineux dans l´atmosphère.
Une des applications possibles de cet outil : la mesure de polluants atmosphériques.
Grande effervescence hier matin sur le campus de la Doua autour de
l´arrivée du laser mobile le plus puissant au monde, le Téramobile.
Jérôme Kasparian, chargé de recherche au Lasim (Laboratoire
des spectrométrie ionique et moléculaire), et une petite
équipe de chercheurs ont retroussé leurs manches pour installer
en extérieur un conteneur de plus de dix tonnes intégrant
le laser et un laboratoire mobile d´observation.
Une bonne dose d´huile de coude, de la poussière et deux
heures ont été nécessaires pour accomplir la " phase
un " d´une expérimentation qui durera près de trois
mois. But du jeu : observer dans des conditions réelles la propagation
d´impulsions laser de haute puissance afin d´optimiser les
paramètres du Téramobile en fonction des applications envisagées,
la première étant la télédétection ultra
efficace de polluants atmosphériques.
Un excellent paratonnerre
Le principe est simple. L´air étant constitué de
poussières diverses qui diffusent la lumière reçue,
il suffit de projeter un faisceau lumineux ultra puissant pour constater,
via l´utilisation d´un télescope, la concentration de
ces particules dans l´atmosphère. En effet, l´intensité
de propagation variera en fonction de leur présence. A terme, grâce
au Téramobile, on pourra tracer une cartographie tridimensionnelle
des composantes de l´air tout au long du chemin du laser et mesurer
plusieurs éléments de pollution à la fois, chose que
ne font pas les détecteurs classiques.
L´autre application viendrait de la vieille idée selon
laquelle le laser serait un excellent paratonnerre. Étudiée
au Japon et au Canada depuis 1970, cette fonction pourrait se concrétiser
bientôt grâce au Téramobile. En effet, lors d´une
expérience récente à Berlin, on a réussi à
déclencher des décharges de deux millions de voltes avec
le laser. La longueur libre de 100 m qu´offre le campus de la Doua
permettra d´aller plus loin dans le processus de recherche.
Le Téramobile est le fruit d´un projet scientifique franco-allemand
de grande envergure impliquant le Lasim, le laboratoire d´optique
appliquée de l´ENSTA Palaiseau, le laboratoire de l´Université
libre de Berlin et celui de l´Université Schiller de Jena.
Il est financé conjointement par le CNRS (Centre national de recherche
scientifique) et son homologue allemand, la DFG (Deutsche Forschungsgemeinschaft)
à hauteur de trois millions d´euros pour quatre ans(*).
Le secret de ce fabuleux outil : des impulsions ultra courtes à
faible énergie (donc inoffensives pour l´environnement) dont
la concentration en un instant extrêmement bref est telle qu´elle
produit une puissance équivalente à celle de 1000 centrales
nucléaires ! Attention les yeux !
CELINE BALLY
(*) Science et Avenir, juillet 2001, n°653